(lila) raise me up.

lila & jacob
wake me up and
take me to the light
C'est comme une obsession. Il est encore à trainer ici. Il passe quasiment tous les jours devant cette galerie. Juste pour jeter un oeil discret à l'intérieur. Quand ses yeux effleurent les courbes de sa silhouette, il a toujours l'impression qu'il la connait par coeur. C'est étrange. Comme s'il savait déjà que ses mains sont douces. Comme s'il connaissait son parfum, et toutes les nuances de ses prunelles. Oui, c'est vraiment étrange. Et Jacob ne comprend rien de tout ça, pour dire vrai. Mais indéniablement, il revient par là. La dernière fois, elle l'a envoyé balader bien comme il le faut. Mais comme un chien acharné (ou simplement un peu concon) il revient de nouveau. Il pénètre dans la galerie, y sent l'odeur de l'art qui émane des tableaux. Il fait mine de les observer. De les détailler poliment. Les mains dans le dos, le pas calme et assuré. Pourtant, ses sens surveillent déjà sa présence. Est-ce qu'elle est là ? Si faut, elle ne travaille même pas aujourd'hui. Est-ce qu'elle va le menacer d'appeler les flics pour harcèlement, s'il insiste trop ? Est-ce qu'il fait vraiment quelque chose de méchant en venant la voir ? Perdu dans ses pensées, Cobb ne regarde pas où il marche. Il fait quelques pas à reculons et bouscule un peu quelqu'un. En se retournant, elle est là. Il ne sait pas trop ce qu'elle représente pour lui. Une femme séduisante et attirante là devant lui ou la projection mentale d'un souvenir très fort qui a fait partie de sa vie. À quel point, il n'en sait rien. Mais il n'arrive pas à faire sans. Il l'a dans la tête. Dans la peau. Il baisse les yeux vivement avant de les remonter, comme un mauvais élève. Enfin, il imagine. Après-tout, il n'a aucun souvenir de l'école. « Désolé, je ne vous avais pas vu.. Euh, je.. » Tu quoi, hein ? Tu rien du tout, Cobb. En effet, alors, il se tait. Cherche quoi dire, mais n'a rien eu le temps de préparer. Il soupire, abandonne, laisse ses yeux noirs et tourmentés se poser sur les couleurs pastels d'un tableau à sa gauche. Sans la regarder, il murmure d'une voix calme, douce, séduisante sans vraiment le vouloir : « Vous êtes ravissante, aujourd'hui. » Aujourd'hui et tous les autres jours. Il va essayer ça autrement. Elle ne veut pas lui dire d'où est-ce qu'ils se connaissent ? Très bien. Alors, il va le lui faire avouer de façon détournée. Parce qu'obligatoirement, ils se connaissent, n'est-ce pas ? Cobb en est persuadé. Sa mémoire ne veut pas le lui rappeler, et elle, elle nie. Mais il va y arriver. Comme si elle détenait une partie de la vérité.

« I'm wide awake, and now it's clear to me
that everything you see ain't always what it seems »

Aujourd’hui, Lila tournait en rond dans la galerie. Pas qu’elle ne savait pas quoi faire, ni qu’elle n’avait rien à faire, mais elle n’avait pas envie. Elle n’arrêtait pas de repenser à la proposition que lui avait fait le nouveau directeur du new york city ballet. Revenir à new york, revenir au ballet. Non ce n’était pas possible. Pas maintenant qu’elle avait cette galerie à tenir. Pas maintenant qu’elle s’était rapprochée de son petit frère. Et encore moins maintenant qu’elle avait envie de savoir qui était cette personne, cet homme qui semblait la connaitre et qui venait la voir tous les jours ou presque pour savoir si elle ne le reconnaissait pas. Au début, elle avait trouvé ça amusant. Sympa comme technique de drague non ? sauf que la dernière fois qu’elle l’avait vu, ça ne s’était pas passé comme d’habitude. Et autant dire que la blondinette s’en voulait un peu d’avoir réagi ainsi. Ce n’était pas son genre de répondre aux gens comme elle l’avait fait ce jour là, loin de là même. Il était juste au mauvais endroit, au mauvais moment. Au fond d’elle, elle espérait qu’il allait revenir à la galerie, qu’elle puisse au moins s’excuser pour son comportement inapproprié. Et pourquoi pas essayer de comprendre pourquoi il pense la connaitre. Bizarrement, elle n’était pas effrayée par son comportement, juste intriguée. Il n’avait pas l’air méchant, mais c’était quand même assez curieux comme situation. Il pensait la connaitre, elle était persuadée de ne jamais l’avoir vu, ni même croisé. Il y en avait forcément un qui se trompait. Et ça, ça intriguait vraiment Lila. Parce qu’elle avait beau réfléchir, elle ne voyait vraiment pas comment elle pouvait connaitre cet homme. Peut-être l’avait-elle déjà croisé à la boulangerie ou au coin de la rue. Mais rien de plus. C’était vraiment bizarre. Puis quelqu’un fini par la sortir de ses pensées en la bousculant. C’était lui. Lila sourit, mine de rien contente de le voir. « Ce n’est rien » elle pensait qu’il ne reviendrait pas, après la façon elle lui avait parlé. Qu’il se serait fait une raison et qu’il allait finir par l’oublier. Mais visiblement ce n’était pas le cas. Elle se mit à sa hauteur, fixant le même tableau. « merci » Elle rougit légèrement, il ne l'avait pas dit très fort, mais quand elle portait ses appareils auditifs, elle entendait facilement des petites choses auxquelles une oreille normale n'aurait pas prêté attention, et là, elle l'avait entendu, c'était touchant comme compliment. « je suis désolée pour l’autre jour, je ne voulais pas être désobligeante. » A les voir, comme ça, face à un tableau, à fixer les différentes couleurs, on aurait dit deux amateurs d’art qui contemplaient un chef d’œuvre. Pourtant, c’était loin d’être le cas, et Lila se demandait bien comment allait tourner leur discussion aujourd’hui.

C’est vrai, elle aurait pu le jeter, le menacer. Peut être qu’en dehors de la galerie, elle l’aurait fait. Mais ici, dans sa galerie, elle se sentait en sécurité. Ça pouvait paraitre un peu bizarre, se sentir en sécurité dans un tel endroit, où le moindre petit tableau peut valoir des millions. Mais elle avait fait installer un système de sécurité assez performant, et puis fallait être réaliste, les vols d’œuvres d’art c’était rarement fait en plein jour. Au pire, le repérage était fait en plein jour, mais Lila n’avait pas l’impression qu’il était là pour ça. Il était bien trop peu discret et paraissait absolument pas intéressé par l’art. Et puis il revenait toujours avec la même question. Un cambrioleur n’aurait sans doute même pas daigné lui adressé la parole ou aurait simplement cherché à connaitre les horaires de la galerie, à prendre la carte professionnelle de Lila. Mais il n’aurait certainement pas cherché à savoir s’il la connaissait. C’est pour ça qu’elle ne se sentait pas menacée. Dans la galerie, elle n’avait rien à craindre finalement. Quelque chose lui disait au fond d’elle que ce jeune homme n’était pas méchant. Il avait certes une idée dernière la tête, mais ne semblait pas avoir un mauvais fond. Bien au contraire, il semblait être à la recherche de quelque chose. Et Lila, aussi étrange que cela puisse paraitre, avait presque envie de l’aider à trouver ce qu’il cherchait. Peut être aussi pour qu’il finisse par la laisser tranquille. Dans tous les cas, il n’avait certainement pas mérité la réaction de lila, la dernière fois qu’ils s’étaient croisés. « Non du tout, c’est moi qui était un peu contrariée. Je n’aurais pas du réagir comme ça ». Brusquement. Lila, c’était la douceur et la gentillesse incarnée et répondre ainsi, c’était bien loin d’être son genre. Elle continuait de fixer le tableau. « Et j’imagine que ce n’est pas ce n’est pas ce magnifique tableau qui vous ramène toujours ici ?! » Elle étouffa un léger rire. C’était plus fort qu’elle, cette façon de toujours tout ramener à l’art, sa passion. « J’aimerai bien vous croire, mais je vous promets qu’on ne s’est jamais rencontrés. » C’est vrai, au fond, elle avait envie de croire qu’elle connaissait cet homme, que c’était elle qui se trompait. Mais elle était persuadée que non, jamais elle ne l’avait vu. Gardant les yeux rivés sur le tableau, elle fut surprise par l’invitation. Elle ne pu s’empêcher de sourire à nouveau. « Vous n’avez rien à vous faire pardonner » Cela dit, Lila ne voulait pas non plus refuser cette invitation, elle ne voulait pas prendre le risque de le vexer ou je ne sais quoi et se sentir coupable, comme ça avait été le cas avec la façon dont elle lui avait répondu la dernière fois. « Oui avec plaisir, mais j’ai encore un peu de travail à la galerie, ça ne vous dérange pas de m’attendre un petit peu ? » Elle regarda vaguement l’horloge, elle n’avait absolument rien fait de la journée, mais là elle avait simplement un coup de fil à passer à cette heure-ci. Le genre de coup de fil qu’elle ne pouvait passer qu’à cette heure ci pour être sure d’obtenir ce qu’elle voulait et elle espérait vraiment que ça ne dérangerait pas le jeune homme et qu’il l’attendrait.